À l’inverse des implantations urbaines du littoral que sont depuis longtemps les ports, les stations balnéaires ne résultent pas d’une lente et progressive installation des populations sur un territoire. Elles se sont répandues sur le littoral français avec une rapidité étonnante et sont, pour nombre d’entre elles, de véritables «villes nouvelles» planifiées. Cette rapidité résulte de la convergence de plusieurs facteurs à un moment donné de l’Histoire. Chacun de ces facteurs mérite d’être analysé afin de situer les processus historiques en jeu, et le stade où en est leur évolution au moment de l’émergence de chacune d’entre elles, et notamment de Sables-d’Or-les-Pins.
La première convergence est celle qui fait que les territoires sableux du littoral s’avèrent disponibles au moment où l’évolution de la demande sociale leur révèle une utilité. Ces «territoires du vide», comme les qualifie Alain Corbin, n’étaient pas totalement ignorés par tout le monde. En tant que limite du territoire national, ils étaient en effet considérés comme des lieux à risque, des lieux fragiles, qu’il importait de mieux connaître et, surtout, de stabiliser. Ce sont ces vastes campagnes de plantations, impulsées par l’Etat-Nation, qui les feront passer de terrains dangereux et mouvants en terrains relativement stables et constructibles, disponibles au XIXe siècle pour l’implantation des stations balnéaires.
Mais cette convergence historique n’aurait pas eu les mêmes conséquences si les sociétés d’Europe Occidentale n’avaient pas connu, entre le XVIIIe et le XIXe siècle, un regain d’intérêt pour l’eau et pour la pratique du bain. Cet intérêt nouveau se portera d’abord sur les stations thermales, qui seront réinvesties, puis réaménagées, avant de passer progressivement du statut de lieu thérapeutique à celui de lieu dédié à la villégiature et aux pratiques mondaines.
Il se portera ensuite, avec l’expansion du chemin de fer, sur le littoral. Il ne s’agira plus alors de réaménager (d’embellir, disait-on alors) des stations existantes, furent-elles embryonnaires, mais d’en créer de nouvelles, de toutes pièces et sur des terrains libres.
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